Endoscopy 2011; 43 - P_344
DOI: 10.1055/s-0031-1273154

Complications hémorragiques du dépistage organisé du cancer colorectal par Hemoccult®: une série de plus de 10000 coloscopies

B Denis 1, I Gendre 1, H Uettwiller 2 P Perrin 1, ADECA Alsace
  • 1Colmar
  • 2Molsheim

Introduction: Le but de ce travail était d'évaluer les complications hémorragiques des coloscopies du programme national de dépistage organisé (DO) du cancer colorectal (CCR) par Hemoccult.

Patients et Méthodes: Les complications hémorragiques du DO du CCR d'une région française étaient recensées auprès de 3 sources, gastroentérologues, médecins généralistes et personnes examinées par coloscopie. Elles étaient classées selon les recommandations de l'ASGE (1).

Résultats: 92hémorragies étaient recensées au décours de 10024 coloscopies: 61 (66,3%) d'intensité légère, 25 (27,2%) modérée et 6 (6,5%) sévère, soit 31hémorragies graves (24 hommes, 7 femmes, âge moyen 65,2 ans). 62hémorragies (67,4%) motivaient une hospitalisation, dont 48 qui survenaient pendant l'examen et motivaient une prolongation d'hospitalisation pour surveillance. Le taux d'hémorragies graves était de 3,1‰ coloscopies, 6,5‰ coloscopies avec polypectomie et 3,1‰ polypectomies. Il était de 1,4‰ coloscopies lorsque la seule source d'information était le gastroentérologue et atteignait 3,6‰ lorsque les 3 sources étaient disponibles (p=0,15). 11 (35,5%) hémorragies graves (dont 7 différées) n'avaient pas été déclarées par les gastroentérologues. 22 (71,0%) hémorragies graves étaient différées, en moyenne de 4,3 jours (1–13). 12 (38,7%) nécessitaient une transfusion (70 culots), 29 (93,5%) une endoscopie itérative (dont 17 avec geste d'hémostase), 4 un séjour en réanimation et 2 un traitement chirurgical. Il n'y avait aucun décès. La durée moyenne d'hospitalisation était de 4,8 jours (1–23). 35,5% des hémorragies graves survenaient sous traitement anticoagulant et 29,0% sous antiagrégant. Le taux d'hémorragies graves variait significativement avec le rendement de la coloscopie: 0,35‰ en l'absence de lésion néoplasique et 8,1‰ en cas de néoplasie avancée (p<0,001); 0‰ en l'absence de polype, 2,1‰ en cas de polype unique et 10,9‰ en cas de polypes multiples (p<0,001); 2,0‰ en cas de plus gros polype ≤10mm et 11,5‰ en cas de polype ≥10mm (p<0,001). Il ne variait pas avec la localisation du polype mais était significativement plus élevé en cas de polype pédiculé (6,1‰ vs. 1,6‰, p<0,001). Il était recensé une hémorragie grave pour 20,5 cancers invasifs et 96,0 néoplasies avancées dépistés, soit un bénéfice-risque 4 fois supérieur au dépistage direct par coloscopie.

Conclusion: Les complications hémorragiques graves du DO du CCR par Hemoccult sont plus fréquentes qu'initialement rapporté. Si l'on adopte la définition de l'ASGE, c'est un taux de 3,1‰ que l'on peut retenir pour informer nos patients. Si l'on définit comme grave toute hémorragie motivant une hospitalisation et si leur recensement recourt à 3 sources d'information, c'est un taux de 7,7‰ qu'il faut retenir. En l'absence de consensus international pour définir leur gravité et les modalités minimales de leur recensement, il est impossible de comparer différentes modalités ou stratégies de dépistage. Le risque d'hémorragie grave est corrélé au rendement de la coloscopie, à la forme pédiculée du polype, à la taille du plus gros polype et au nombre de polypes réséqués.

Références: (1) Cotton PB et al. Gastrointest Endosc 2010; 71: 446–54.