Endoscopy 2009; 41(03): 387
DOI: 10.1055/s-0032-1306764
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Commentaire de travail de R. Quispel et al., pp. 187

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Publication Date:
15 March 2012 (online)

R. Quispel, O. S. van Boxel, M. E. Schipper, V. Sigurdsson, M. R. Canninga-van Dijk, A. Kerckhoffs, A. J. P. M. Smout, M. Samsom, M. P. Schwartz. Forte prévalence de l'atteinte oesophagienne dans le lichen plan: une étude utilisant la chromoendoscopie avec magnification

Le lichen plan est une affection cutanéo-muqueuse d'étiologie inconnue, qui atteint habituellement les adultes d'âge moyen. Les lésions muqueuses intéressent la cavité buccale dans 30 à 70% des cas et peut survenir de façon isolée ou en association avec une atteinte cutanée. Le lichen plan est connu pour avoir un potentiel malin, il prédispose à un carcinome épidermoïde buccal dans 2 à 3% des cas.

Le lichen plan oesophagien peut entraîner des sténoses symptomatiques de l'oesophage proximal simulant des lésions carcinomateuses. La majorité des données sur le lichen plan oesophagien vient d'une étude de cas rapportant un total de 45 patients avec une sténose symptomatique oesophagienne. En 1990, Dickens et al ont rapporté une étude endoscopique chez 19 patients présentant un lichen plan pour établir une prévalence de l'atteinte oesophagienne. Ils ont trouvé cinq patients avec un lichen oesophagien, le diagnostic étant fondé sur des critères endoscopiques et histopathologiques.

Les anomalies endoscopiques vont de petites lésions papulaires, à des décollements superficiels de la muqueuse ou des érosions de l'oesophage distal ou proximal. Les biopsies vont d'un infiltrat lymphocytaire sous muqueux compatible avec le lichen, à une nécrose de la couche basale de l'épithélium stratifié avec un infiltrat inflammatoire mixte.

Récemment quatre cas de cancers épidermoïdes sur un lichen plan oesophagien ont été rapportés par cette équipe hollandaise d'Utrecht. Cela les a incités à réaliser une étude utilisant la chromoendoscopie à l'indigo carmin avec magnification pour évaluer la prévalence des anomalies endoscopiques et histopathologiques, et la recherche de dysplasie dans une cohorte de patients avec un lichen plan oro-cutané.

Entre janvier 2000 et septembre 2005, les patients présentant un lichen plan cutané et/ou buccal ont été invités à participer à l'étude. Les symptômes étaient évalués à l'aide d'un questionnaire.

Une endoscopie était réalisée dans un premier temps sans magnification. Les signes d'oesophagite peptique étaient gradés selon la classification de Los Angeles. Les irrégularités étaient décrites selon la classification de Paris. Dans un second temps la magnification (×80) était utilisée avec une coloration par l'indigo carmin à 0,2%.

Des biopsies étaient prélevées sur la muqueuse d'apparence normale à trois niveaux de l'oesophage, ainsi que sur les lésions repérées. La présence d'un infiltrat inflammatoire lymphohistiocytaire et de corps de Civatte étaient considérés comme critères du diagnostic de lichen plan.

24 patients ont été inclus dans cette étude prospective. Les symptômes étaient en général légers. Des signes d'oesophagite érosive de grade A et B étaient retrouvés chez huit et quatre patients respectivement. Quatre patients avaient un Barrett court.

Des anomalies focales ont été retrouvées chez 20 patients: Papules blanchâtres, endoscopiquement classées comme acanthose, décollements de muqueuse, lésions hyperhémiques, plaques sous muqueuses, une lésion polypoïde plane ont été retrouvées chez sept patients. Aucun aspect endoscopique, ni irrégularité muqueuse ni remaniement de l'architecture micro vasculaire avant et après magnification, n'évoquait de zone dysplasique ou maligne.

En histologie, la prévalence du lichen plan oesophagien était de 50%. Aucune dysplasie n'a été retrouvée. Une dilatation de l'espace inter cellulaire et une hyperplasie étaient plus souvent retrouvées. Dans 75% des cas, le lichen plan oesophagien était diagnostiqué sur des biopsies prélevées dans l'oesophage proximal. Trois patients avaient des biopsies évocatrices de lichen plan à tous les niveaux de l'oesophage.

Dans 25% des cas, un diagnostic de lichen plan a été réalisé sur des biopsies prélevées sur une muqueuse d'apparence normale. Dans 50% des cas, le lichen plan était retrouvé à la fois sur des anomalies focales et sur une muqueuse d'aspect normal. Dans 17% des cas, le diagnostic était fait uniquement sur les anomalies focales.

Il n'y avait pas de différence de prévalence de l'oesophagite par reflux entre les groupes avec ou sans lichen.

Tous les patients présentant un lichen plan histologique (n=12) présentaient au moins une lésion focale à l'endoscopie. Les papules blanchâtres étaient les lésions les plus communes, mais l'acanthose était également répartie entre les deux groupes.

Trois types de lésion focale pouvaient faire évoquer le lichen plan: les décollements superficiels, les anomalies focales hyperhémiques et les plaques ou papules sous muqueuse.

Les symptômes suggérant une pathologie oesophagienne comme la dysphagie, l'odynophagie, le pyrosis et des régurgitations étaient retrouvés chez neuf patients dont quatre ayant un lichen plan. Il n'y avait pas de différence significative entre les deux groupes.

Cette étude endoscopique suggère que la prévalence de l'atteinte oesophagienne chez les patients présentant un lichen plan est beaucoup plus importante que ce qui était précédemment attendu. Aucune dysplasie n'a été trouvée chez ces patients. Les biopsies doivent être réalisées en muqueuse saine et sur les lésions focales. Les symptômes ne sont pas spécifiques. Le diagnostic du lichen plan oesophagien est difficile d'abord parce que les endoscopistes et les histopathologistes ne sont pas familiers avec ce diagnostic. En cas d'oesophagite par reflux, il n'est pas très clair qu'il s'agisse d'une conséquence du lichen oesophagien ou d'une maladie indépendante qui peut perturber le diagnostic histologique. Les auteurs font l'hypothèse que la présence d'un lichen plan peut fragiliser la muqueuse et la rendre sensible à l'agression.

Sur le plan histologique il faut noter la forte prévalence de la dilatation de l'espace inter cellulaire qui était précédemment considéré comme un critère spécifique de l'oesophagite par reflux.

Question: Doit-on faire une endoscopie chez tous les patients présentant un lichen plan orocutané? Dans la mesure o\`u aucune dysplasie n'a été retrouvée, les auteurs proposent de ne réaliser une endoscopie que chez les patients qui présentent une symptomatologie évocatrice d'une atteinte oesophagienne, un traitement précoce de ces lésions pouvant éviter le développement de sténose.

Autre question: i on réalise une endoscopie chez des patients atteints de lichen plan que doit-on chercher? Des décollements muqueux, des anomalies focales hyperhémiques ou des plaques ou papules sous muqueuses.